Pourquoi les constructeurs chinois conquièrent l'Italie à toute vitesse

Pourquoi les constructeurs chinois conquièrent l'Italie à toute vitesse

C’est une petite révolution qui est en train de se jouer de l’autre côté des Alpes, sur les terres historiques de Fiat, Lancia et Alfa Romeo. Alors que l’Italie a longtemps été considérée comme un bastion imprenable pour les constructeurs étrangers, le paysage automobile de la péninsule est en train de changer de visage à une vitesse fulgurante.

En l’espace de quelques mois seulement, les voitures venues de l’Empire du Milieu ont réussi un tour de force : doubler leur part de marché. De 5 % en début d’année, elles frôlent désormais les 10 % de pénétration. Une percée spectaculaire qui ne doit rien au hasard, mais tout à une combinaison improbable de cynisme politique, d’opportunités économiques et de stratégie industrielle désespérée.

Une invasion silencieuse mais massive

Si vous vous promenez aujourd’hui dans les rues de Milan ou de Rome, vous remarquerez que les Fiat Panda ne sont plus les seules à occuper le terrain. Les bus électriques de Florence portent désormais le logo de BYD, et les particuliers se tournent massivement vers des marques qui étaient encore inconnues il y a deux ans.

Les chiffres sont têtus. Sur le segment de l’électrique, ce ne sont pas les Tesla ou les Volkswagen qui mènent la danse, mais bien la BYD Dolphin et la Dacia Spring (qui, rappelons-le, est fabriquée en Chine). Plus surprenant encore, les Italiens, grands amateurs de motorisations hybrides rechargeables (PHEV), plébiscitent désormais les nouveaux venus comme Omoda et Jaecoo, deux émanations du géant Chery, ainsi que les modèles de MG (groupe SAIC).

Cette déferlante met d'ailleurs en péril des acteurs locaux un peu particuliers. Prenez le cas de DR Automobiles. Cette marque italienne a bâti sa fortune sur un secret de polichinelle : elle importe des pièces de Chine (principalement de chez Chery), les assemble en Italie façon "LEGO" (le procédé CKD), et y appose un logo italien. Jusqu'ici, cela permettait de contourner les réticences des acheteurs. Mais maintenant que les "vraies" marques chinoises arrivent en direct avec des prix agressifs et l'accès au bonus, l'intermédiaire DR risque de se retrouver coincé.

Le bonus italien : un tapis rouge pour Pékin

La situation italienne est un paradoxe total par rapport à la France. Chez nous, le gouvernement a mis en place le fameux "score environnemental" pour empêcher les voitures fabriquées en Asie (au bilan carbone logistique lourd) de toucher le bonus écologique. C’est du protectionnisme déguisé.

En Italie ? C’est "Open Bar". Depuis septembre, le gouvernement de Giorgia Meloni a ouvert les vannes d’un bonus pouvant atteindre 5 000 euros. Et surprise : aucun critère de lieu de production n’est exigé. Que votre voiture soit fabriquée à Turin ou à Shenzhen, l’État italien signe le chèque.

C’est une aubaine inespérée pour BYD, SAIC et Chery, qui peuvent ainsi écouler leurs stocks européens en Italie en affichant des tarifs imbattables, subventionnés par le contribuable italien.

L'argent de Bruxelles n'a pas d'odeur

La question qui brûle les lèvres est évidente : pourquoi un gouvernement nationaliste comme celui de Giorgia Meloni, qui n’a jamais caché son scepticisme face à la transition électrique forcée par l’Europe, finance-t-il ainsi l’industrie chinoise ?

La réponse est purement financière. L’Italie a besoin d’argent. Beaucoup d’argent. Pour débloquer les fonds du "Plan national de relance et de résilience" mis en place par l’Union Européenne (une enveloppe colossale de près de 200 milliards d’euros pour l’Italie), Rome doit montrer patte blanche. Bruxelles exige des résultats concrets en matière de transition écologique et d'électrification du parc automobile.

Pour toucher les milliards de l'Europe, l'Italie doit donc vendre des voitures électriques, et vite. Peu importe d'où elles viennent. C’est un calcul cynique : on subventionne les voitures chinoises (coût : environ 600 millions par an) pour débloquer les centaines de milliards de l’aide européenne. L’écologie n’est ici qu’un prétexte comptable.

Le bras de fer avec Stellantis

Il existe une autre raison, plus stratégique, à cette ouverture des frontières : la guerre ouverte entre le gouvernement italien et le groupe Stellantis (Fiat, Peugeot, Citroën, etc.). Les usines historiques italiennes (Mirafiori, Melfi) tournent au ralenti. La production a chuté de près de 30 %, faisant craindre des vagues de licenciements massifs dès l'an prochain. Le gouvernement italien se sent pris en otage par Carlos Tavares et cherche désespérément une alternative.

Le plan de Rome était audacieux : séduire les constructeurs chinois en leur montrant que l’Italie est un terreau fertile (grâce aux bonus), dans l’espoir qu’ils viennent racheter les usines vides ou en construire de nouvelles. L’État était même prêt à entrer au capital d'une coentreprise avec Dongfeng pour les inciter à s'installer.

Un pari risqué et déjà perdant ?

Malheureusement pour l'Italie, cette stratégie de séduction semble avoir du plomb dans l'aile. Dongfeng, après avoir étudié le dossier, a poliment décliné l'offre. Pourquoi ce refus ? La géopolitique a changé. Pékin semble désormais moins enclin à investir massivement en Europe, préférant se tourner vers des marchés plus accueillants comme l'Amérique du Sud, ou se concentrer sur sa domination technologique interne.

L'Italie se retrouve donc dans une position délicate : elle finance la conquête de son propre marché par des concurrents féroces, sans avoir obtenu la garantie d'usines et d'emplois en retour. Les consommateurs italiens, eux, profitent pour l'instant de voitures modernes et abordables, mais le réveil industriel risque d'être douloureux.

"Cette offensive des constructeurs chinois bouleverse les repères des acheteurs. Avant de vous décider entre ces nouvelles technologies, il est crucial de bien calculer votre budget réel : consultez notre comparatif détaillé sur le coût de recharge entre électrique et hybride pour y voir plus clair.

Par ailleurs, si l'incertitude sur les prix du neuf vous fait hésiter, le marché de la seconde main reste une valeur sûre en France. Ne manquez pas nos conseils d'experts dans notre guide complet pour acheter ou vendre une voiture d'occasion."

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